S’il y a bien une personne qui a marqué l’histoire de l’horlogerie avec ses montres au design avant-gardiste c’est Monsieur Gérald Genta. Comme Hemingway ou encore Andy Warhol, le designer de produits Gérald Genta émerge au 20eme siècle comme une figure dominante dans son domaine et plus particulièrement dans l’horlogerie. D’ailleurs, peu de gens connaissent le nom de Gérald Genta en dehors du monde horloger. Cet homme a su casser les codes en apportant son univers et sa touche personnelle dans chacun des modèles de montre qu’il a designé.
Bien que décédé en 2011, l’esprit de ce grand homme qui est une figure emblématique du monde de l’horlogerie vit encore à travers les garde-temps fascinants qu’il a designé. Audemars Piguet Royal Oak, Omega Constellation mais sans oublier la Patek Nautilus ou encore un grand nombre de collaborations avec les marques Van Cleef, Cartier, Hamilton etc … Voilà une partie de l’héritage de Monsieur Genta, des montres mondialement connues et qui s’arrachent sur le marché de l’horlogerie.
LES DÉBUTS D’UN HORLOGER DEVENU EMBLÉMATIQUE
Né à Genève le 1er Mai 1931, Charles Gérald Genta a obtenu son diplôme fédéral suisse de bijoutier et d’orfèvre en 1951 à l’âge de 20 ans. À 23 ans, Genta crée des montres pour la célèbre maison horlogère Universal Genève. Aujourd’hui, les collectionneurs considèrent sa Polerouter Universal Genève des années 1950 et ses Golden et White Shadows des années 1960 comme des classiques du style du milieu du siècle. Ces montres signent le renouveau du minimalisme. Les créations de Gérald Genta de cette époque sont en totale résonance avec l’esthétique et l’optimisme de l’après-guerre.
La montre Polerouter utilisait un système de micro-rotor totalement innovant afin de remonter la montre. Malgré un long conflit de brevet avec la marque Benrus pour ce micro-rotor, les premiers modèles de Polerouter étaient quand même fabriqués avec ce dispositif intelligent. Le Calibre 215 d’Universal Genève pouvait donc résister aux forces magnétiques du survol du Pôle Nord. La Polerouter a donc très vite équipé la compagnie aérienne Scandinavian Airlines System qui réalisait à l’époque des vols Copenhague – Los Angeles en passant par le Pôle Nord.
Ce Calibre 215 unique est à l’origine de l’histoire d’amour de Gérald Genta et la conception de montres fines autour de mouvements fins. Ces montres Golden Shadow et White Shadow qui datent des années 1965 étaient animées par les mouvements de montre automatique les plus fins du monde, avec seulement 2,3 mm d’épaisseur. Un record jusqu’en 1978.
LE PASSAGE DE LA TECHNIQUE AU DESIGN
Le passage de Genta du côté technique au côté design a été relativement facile et logique. À l’époque, il n’y avait pas de pôle dédié au design, avant Genta très peu de maisons horlogères disposaient d’un service de design produit ou d’un designer en interne. Le style d’une montre, sa forme globale et surtout le travail des détails était purement fonctionnel. Une montre était faite comme ceci ou cela simplement pour répondre à un but précis.
Le cadran de la Polerouter a servi de modèle à l’Omega Constellation de 1959, conçue elle aussi par Gérald Genta. L’Omega Constellation de Genta marque la fin d’une période pour le créateur qui se tournera bientôt vers des modèles bien plus révolutionnaires.
En 1968 les montres Shadow d’Universal Genève réalisées par le designer ont attiré l’attention d’une grande manufacture qui n’est pas des moindres puisqu’il s’agit de Patek Philippe. La maison Patek engage alors Gérald Genta pour concevoir la Golden Ellipse.
La Golden Ellipse a donc fait ses débuts en 1968 et a directement connu un grand succès dans les années 1970, elle s’est ensuite réduite à des modèles plus féminins incrustés de pierres précieuses dans les années 1990, pour finalement, revenir à ses racines. Cette Golden Ellipse fonctionne avec le Calibre 240 de Patek avec un micro-rotor qui permet d’atteindre une épaisseur de 6mm au total.
LES ANNÉES 1970, LE SOMMET DE LA CARRIÈRE DE GÉRALD GENTA
Les années 1970 se sont avérées être la décennie des succès de Monsieur Genta. Il a conçu des classiques pour Bulgari, Audemars Piguet, IWC ainsi que Patek Philippe.
En 1975, la marque Bulgari sort leur fameuse montre Bulgari Bulgari, une montre qui défie toutes les attentes que l’on pouvait avoir à l’égard du travail de Genta. Le designer s’est inspiré d’une pièce de monnaie romaine pour la lunette, en y gravant simplement le nom de la marque à deux reprises d’ou le nom Bulgari Bulgari. Pour ce qui est de la forme du boîtier, Genta s’est inspiré des colonnes de l’architecture romaine antique. La montre Bulgari Bulgari est un énorme succès de la marque italienne depuis maintenant des décennies.
Gérald Genta était un horloger extrêmement compétent et un designer expérimenté. Il était au bon endroit au bon moment pour créer des garde-temps hors du commun qui ont su marquer l’histoire de l’horlogerie. A une époque où l’avenir incertain des horlogers suisses les a incités à prendre des risques. Une époque où les designers avaient le désir d’aller à l’encontre du système pour remettre en question les normes existantes et casser les codes.
C’est justement en remettant les normes en question que le designer à créer les deux pièces iconiques que sont la Royal Oak d’Audemars Piguet et la Nautilus de Patek Philippe.
Sorti en 1972 en plein milieu de la crise du quartz, le design de la Royal Oak est inspiré des casques de plongée et c’est d’ailleurs pour cela que l’on retrouve ces 8 vis sur la lunette. Cette montre iconique avec son bracelet intégré a été LA montre qui a sauvé la marque Audemars Piguet. Mais Genta ne s’est pas arrêté là, il a effectivement répété ce tour de magie pour Patek Philippe avec la Nautilus de 1976 inspiré par la Royal Oak.
C’est tout simplement Patek Philippe qui a imité Audemars Piguet en engageant Genta afin de concevoir en 1976 leur futur montre iconique qu’est la Nautilus. Cette montre de sport de Patek a été accueillie de façon mitigée mais elle a permis à la marque de rester dans la course face à la rapide évolution du monde de l’horlogerie.
Les deux montres sont considérées comme des chefs-d’œuvre. Elles sont encore en production mais pour certains modèles les listes d’attente de plusieurs années sont interminables.
Mais comme on le dit très souvent (vous savez déjà ce que je vais dire) jamais 2 sans 3. La marque IWC avait elle aussi besoin d’un petit coup de peps pour rester au goût du jour. En 1976, IWC introduit l’Ingenieur, une montre réalisée par Genta en personne. Alors certes, l’Ingenieur de IWC est bien moins connue que la Royal Oak ou la Nautilus mais ces 3 montres font parties du succès des années 70 de Charles Gérald Genta.
Dans les années 1969, Genta a créé sa propre marque qui porte tout simplement son nom “Gérald Genta”. La marque a été ensuite rachetée par Bulgari. L’entreprise de Genta a produit des montres qui de nos jours se vendent encore une fortune aux enchères. Et ce car d’une part ces montres enferment avec elles l’histoire d’un homme qui a bouleversé le monde de l’horlogerie mais aussi car elles étaient produites en très petite quantité.
Fort de sa réputation dans le domaine, l’horloger obtient en 1980 une licence de la marque Walt Disney qui l’autorise à lancer une collection de montres qui arbore les personnages Disney en décoration.
LE MOT DE LA FIN
Comment vous vous en doutez il est impossible de retracer en un seul article l’ensemble des garde-temps produits et conçus par le designer suisse. Genta est aussi à l’origine de la fameuse montre Pasha de Cartier et de la Rolex King Midas en plus d’avoir collaboré avec un grand nombre de marques tel que Seiko, Timex ou encore Benrus. Nous publierons d’autres articles sur certains des modèles qu’il a designé. Le travail de cet homme, Gérald Genta, restera à tout jamais graver dans l’histoire et dans les montres auxquelles il a donné vie. Alors si vous êtes l’heureux détenteur d’une montre conçu par ce génie de l’horlogerie, chouchoutez là, prenez en soin et surtout transmettez-la aux générations suivantes.